Yoga et douleurs chroniques : la place du yoga dans un Centre de Traitement et d’Evaluation de la Douleur à Lille

Contexte

La douleur chronique ou « douleur maladie » est un syndrome multidimensionnel ex. Elle est en général multifactorielle, avec des facteurs d’entretien psychosociaux et culturels, des conséquences physiques, morales et sociales. Elle est un problème de santé publique d’une ampleur considérable, car elle affecte un plus grand nombre d’usagers que le cancer, les maladies cardiovasculaires, le diabète et la maladie d’Alzheimer réunis. La douleur chronique reste sous-estimée et traitée de façon insatisfaisante. Elle touche en moyenne 35,5% de la population. Cependant, ils sont seulement 30% d’entre eux à bénéficier d’un traitement approprié à leur douleur et uniquement 2% seront pris en charge dans un service spécialisé de la douleur. Plusieurs maladies chroniques sont sources de douleurs chroniques, il peut aussi être question d’une zone du corps ou la douleur persiste malgré les traitements. Cette pathologie est un enjeu économique et social car elle induit une forte consommation de soins, en moyenne 10 consultations chez le médecin généraliste par an, soit deux fois plus que les autres malades. Les arrêts de travail sont 5 fois plus fréquents que dans la population générale. 45 % des patients douloureux ont des arrêts de travail dont la durée moyenne cumulée dépasse 4 mois/an. 65% d’entre eux ont moins de 60 ans et sont en invalidité de 1ère et 2ème catégorie. Le coût financier pour la société est conséquent, plus de 200 milliards d’euros par an en Europe et 635 milliards de dollars par an aux États-Unis en 2008. Outre ce fardeau économique, des études démontrent la dégradation considérable de la santé et de la qualité de vie lorsque la douleur chronique est présente. En France la fréquence des comorbidités associées à la douleur chronique est deux fois supérieure à celle retrouvée dans la population générale. Les comorbidités les plus associées à la douleur chronique sont liées à des altérations majeures de la qualité de vie : incapacité et difficulté à assumer les rôles familiaux et sociaux (absentéisme au travail, licenciement, chômage, divorce); troubles du sommeil (43% des douloureux chroniques ont des difficultés à s’endormir) ; anxiété ; dépression pour 20% des malades; troubles digestifs ; addictions; obésité, trouble de la sexualité…Quotidiennement, ce sont plus de 50% des patients sont dans l’incapacité de réaliser leurs activités quotidiennes.

Objectifs de l’étude

Plusieurs études à l’étranger ont montré les effets bénéfiques du yoga sur les fonctions viscérales et corporelles, la respiration, la santé psychologique et la douleur. En France 3 hôpitaux utilisent massivement les outils du yoga pour leurs patients, dont un centre antidouleur à Eaubonne. Cette proposition de prise en charge proposée au centre antidouleur de Lille avait pour objectif auprès des malades de : -Diminuer l’intensité et la sensation de la douleur -Améliorer la qualité de vie des patients grâce à l’adaptation des outils du yoga et une pratique régulière, autonome de la discipline. -Révéler par des questionnaires scientifiques les bénéfices du yoga. Les questionnaires utilisés : QDSA (Questionnaire de Saint Antoine Abrégé), Questionnaire sur la qualité de vie SF-12 ; Echelles d’amélioration du changement ; Echelle Numérique Visuelle de la douleur ; Schéma de localisation de la douleur. Une orientation et une adaptation des outils du yoga sont utilisées pour rendre le malade plus autonome au quotidien, afin qu’il réussisse à gérer les conséquences récurrentes de sa douleur chronique.

Conclusions de l’étude

Concernant le questionnaire sur la qualité de vie SF-12, ils sont 83% des patients pour lesquels la pratique du yoga a pu accroitre ou confirmer un gain des capacités physiques et 58% pour lesquels le score mental et social a augmenté. Les échelles d’amélioration du traitement de la douleur révèlent que 75% des patients estiment leur changement ressenti par la pratique du yoga comme étant favorable. Les questionnaires QDSA révèlent une baisse chez 42% des patients de la part sensoriel de leur douleur et chez 77% des patients la part affective de leur douleur. Le relevé des échelles numériques de la douleur avant et après les séances a mis en évidence une baisse des chiffres de l’intensité de la douleur ou une stabilisation de ces derniers. Quelle que soit la localisation des points douloureux sur le schéma corporel, la série de séance de yoga a permis une amélioration et un soulagement d’environ deux tiers des patients. Une diminution de l’anxiété ,des troubles du sommeil et une amélioration de la digestion, la respiration ont pu être observées. De plus les patients ont pu prétendre et atteindre un objectif de vie quotidienne : une inscription à pôle emploi ; une recherche ciblée de formation ; une adaptation des horaires de travail ; reprendre ou entreprendre une coopération au sein d’une association ; jardiner à nouveau ; intégrer d’autres activités physiques ; mettre en place un suivi psychologique, addictologique ou diététique ; s’impliquer autrement dans leur vie de famille…et aussi créer des liens entre eux pour se soutenir. Le yoga a toute sa place dans un parcours de soin intégratif et pluridisciplinaire du patient. Il diminue le temps d’attente ; permet au patient de se remobiliser et de limiter des comportements kinésiophobes ou le catastrophisme ; il améliore la qualité de vie du patient et diminue le ressenti de sa douleur.